[Annecy 2023] The Tunnel to Summer, the Exit of Goodbyes

par Guillaume Lasvigne,
Voulez-vous définitivement définir votre édition comme Français ? oui

Un titre à rallonge, un argument fantastique pas vraiment assumé ne servant que de métaphore à des banalités portées par des personnages tirant la tronche pendant un peu plus d'une heure ? Pas de doute, nous sommes bien dans une adaptation de light novel ! En l'occurrence, le roman éponyme de Mei Hachimoku, récompensé du grand prix Gagaga au Japon et ici mis en images sous l'égide du studio CLAP et de son réalisateur Tomohisa Taguchi.

Ce premier des deux films japonais présentés en compétition officielle du Festival d'Annecy n'a pour autant rien de déshonorant. Le postulat ? Un mystérieux tunnel serait capable d'exaucer tous les vœux de ceux qui y pénètrent. Seulement, ceux-ci ont un prix, à savoir celui d'un temps précieux qui s'écoule beaucoup plus lentement à l'intérieur qu'à l'extérieur et poussant donc ceux qui le parcourent à un sacrifice potentiellement très lourd...

Partant de là, la note d'intention est claire : avec son personnage principal désirant ramener à la vie sa petite sœur décédée, il sera bel et bien question d'évoquer l'importance du temps présent, face à celui perdu à s'accrocher à un passé révolu. Sauf qu'à ce petit jeu de la romance s'affranchissant des limites de l'espace et du temps, Makoto Shinkai avait déjà pris… un temps d'avance, justement, avec son superbe Voices of a Distant Star qu'il réalisa en 2002. La comparaison semble inévitable, tant l'approche narrative (jusque dans l'utilisation de SMS témoignant des années s'écoulant inlassablement) et visuelle évoque le réalisateur de your name., du moins en apparence. L'emploi du bokeh par exemple, s'il se révèle d'abord imparable pour caractériser son protagoniste coupé du monde, semble plus tenir d'une afféterie visuelle omniprésente (mais fort jolie) que d'une véritable intention de cinéaste.
Cette impression est renforcée par un récit qui ne décolle vraiment que dans un dernier quart d'heure utilisant enfin le fantastique pour parler de ses personnages. Jusque-là, les allées et venues dans le tunnel se font avec les conséquences de plusieurs heures ou jours d'absence dans le monde réel… sans que cela n'ait la moindre conséquence sur le duo ou le monde qui l'entoure. Seuls les dialogues permettent au jeune couple d'évoluer dans des proportions pour le moins relatives. Le fantastique, lui, ne semble là que pour expliquer ses propres règles (plus l'on s'enfonce dans le tunnel, plus le temps file à l'extérieur) avant un final qui les exploite enfin. Pendant la grosse heure qui précède, s'impose surtout le constat d'une production empilant tous les poncifs de la romance adolescente impersonnelle et inoffensive.

En fin de compte, The Tunnel to Summer, the Exit of Goodbyes est donc un pur produit de son temps, dans ses qualités comme dans ses limites. Le film aurait même pu prétendre à se situer dans la moyenne haute de l'industrie avec un récit plus resserré et des enjeux plus denses que la figure de style présentée dès l'évocation de son postulat. Bref, s'il avait eu un peu plus d'âme.


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