Interview avec Takayuki Hirao, le réalisateur de Pompo: The Cinéphile

par Kim Morrissy,
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Le film d'animation Pompo: The Cinéphile a fait sa première ce vendredi au Japon. Inspiré du manga éponyme de Shogo Sugitani, ce titre qui porte sur la productation d'un film live-action marque les débuts dans la cour des grands du studio CLAP – pour une œuvre d'animation. Notre équipe a eu l'occasion de s'adresser à Takayuki Hirao via un appel vidéo pour en apprendre plus sur la réalisation de ce projet, notamment dans le cadre de la pandémie du COVID-19 ; mais également afin de le questionner sur sa fonction de réalisateur et sur sa connexion – qui est vous allez le voir surprenante – avec le film.

Il n'y a pas encore beaucoup d'informations concernent ce film d'animation, alors, pour commencer, pourriez-vous nous en résumer l'histoire ?

Pompo: The Cinéphile a démarré sous la forme d'un manga sorti sur pixiv. Il se déroule en Amérique, à Nyallywood – une référence à Hollywood. Il raconte l'histoire d'une productrice de film appelée Pompo et d'un aspirant réalisateur nommé Gene. Il y a également Natalie, qui veut devenir une actrice. Pompo les conseille et repère leurs talents, et ensemble ils créent un film intitulé Meister. Pour Gene et Natalie, c'est la première fois qu'ils créent un film…Parviendront-ils à aller au bout de ce projet ? C'est ce que le film dévoile.

Avant de faire cette interview, j'ai eu la chance de lire le manga original. Il y a un personnage nommé Corvette, et j'ai été très surprise que son film favori soit Magical Sisters Yoyo & Nene, que vous avez également réalisé. J'aimerais vous demander ce que vous avez ressenti en lisant cette scène.

Je n'en avais personnellement aucune idée avant que quelqu'un ne me montre le manga. J'ignorais qu'un manga de ce genre existait. Je me souviens avoir été surpris en découvrant qu'un personnage dans le manga considérait que Magical Sisters Yoyo & Nene était l'un de ses films favoris. Je n'ai eu aucun échange avec l'auteur à ce propos, c'est quelqu'un d'autre qui me l'a dit. C'était donc une parfaite coïncidence.

Est-ce que cela a influencé votre volonté de réaliser le film, après en avoir pris conscience ?

La personne qui m'a présenté Pompo est un producteur. Il m'a demandé de lire le manga et de me dire ce que j'en avais pensé. C'est à partir de là qu'il m'a été demandé de réaliser le film. Il n'était pas juste question de savoir s'il était intéressant, mais plutôt de déterminer s'il contenait des thèmes que je voulais explorer, en tant que réalisateur.

L'un des sujets qui est venu sur la table, lorsque nous parlions de Pompo: The Cinéphile, est qu'il n'y avait pas vraiment de méchant distinct. En ce sens, il est similaire à Magical Sisters Yoyo & Nene. C'est quelque chose qui m'a séduit dans l'ouvrage, l'une des raisons qui m'ont poussé à réaliser le film. Il contient des thèmes sur lesquels je veux travailler.

Lorsque je lisais le manga, certaines phrases m'ont particulièrement touchée. « Ceux qui se sont échappé de la réalité créeront un monde juste pour eux. » Cette phrase semble-t-elle véridique pour vous aussi ?

Mhm… Dans la vraie vie, c'est l'une des raisons principales qui vont vous motiver à créer une histoire. Après cela, lorsque vous essayer réellement de créer une histoire et de la partager avec les autres, je ne pense pas que cela soit suffisant. C'est mon avis personnel. Il est important de savoir communiquer, il est nécessaire de garder à l'esprit la manière dont les autres vont percevoir votre travail. Si vous êtes capables de ressortir ce qui sommeille en vous et que cela est accepté des autres immédiatement, vous êtes probablement un génie.

Jusqu'à quel point vous retrouvez-vous dans l'histoire de Pompo, en tant que réalisateur ?

Je me retrouve dans ce sentiment de joie que l'on ressent à créer des choses, et dans les moments joyeux où les personnages se déplacent et travaillent ensemble, en groupe. C'est pareil à la continuité d'un festival d'école. Le monde de l'animation a cette atmosphère également, c'est donc quelque chose auquel je m'identifie. C'est une représentation très idéaliste, vous comprenez ?

Il y a une autre réplique qui m'a marquée dans le manga. « Même les anime peuvent devenir des films. » Êtes-vous d'accord avec cela ?

Voulez-vous dire qu'un anime peut vous immerger dans un monde et vous donner l'impression que vous assistez réellement à la scène, tel qu'un film le ferait ?

Oui, quelque chose comme ça.

C'est personnellement quelque chose que je cherche à faire lorsque je créé des anime. Il est vrai que, comparé à un film en live-action où les acteurs sont filmés dans des locations réelles, un anime ne peut traduire ce sens de la réalité sur un même niveau. Toutefois, il peut y être plus facile d'accentuer certaines choses, comme les thèmes, le symbolisme, ou les personnages. Si le public peut comprendre et s'identifier à ces choses, alors je pense qu'on est dans l'expérience cinématographique.

Il y a eu quelques anime portant sur la création d'anime, mais très peut concernant la création de films live-action. Est-ce que la création de ceux-ci vous intéressent ?

Ouais. Je suis un ancien élève de l'Université des Designers d'Osaka, et j'ai toujours eu un goût prononcé pour la création de live-action. Je pensais initialement m'orienter vers l'industrie du film, mais les choses ne se sont pas déroulées ainsi. J'ai fini par choisir l'animation car j'aimais les anime. Mais si on parle de mes intérêts personnels, et bien, oui j'ai toujours aimé ce format.

Pour les œuvres dans lesquelles vous avez été impliqué jusqu'à présent, vous êtes-vous déjà rendu compte d'avoir eu des influences live-action ?

Oui, j'ai peut-être bien quelques influences. Toutefois, c'était la mode lorsque j'ai commencé à réaliser. Il y avait un mouvement qui visait à faire du compositing dans les anime quelque chose qui se rapprochait plus de la manière dont on film avec une caméra, et cela est toujours d'actualité. Par exemple, il y a des effets reproduisant les effets de lentille des appareils, et les jeux de lumière sont fait en considération de la manière dont les ombres apparaîtraient si les séquences étaient tournées dans une location réelle. Mon propre travail peut être admis dans cette tendance.

Quant à comment cela se ressent dans ce film, il y a deux éléments à prendre en compte : l'histoire principale, et le film au sein du film. L'histoire principale est créée d'une manière plus semblable à une image ; tandis que le film dans le film est créé comme s'il avait été filmé avec une caméra. La différence c'est que le premier élément est dessiné après avoir visualisé les scènes via l'imagination ; tandis que le deuxième recréé ce qui peut être montré au travers d'une caméra.

Vous êtes impliqué dans de nombreuses œuvres d'ufotable. Je pense que beaucoup d'entre-elles se démarquent d'un point de vue cinématographique – avez-vous appris là-bas quelque chose à ce sujet ?

L'une des choses principales que je retiens d'ufotable est la manière de gérer la musique. Normalement, avec les anime, il y a un directeur son. C'est d'ordinaire celui qui décide quelle musique jouer à quel moment ; mais au studio ufotable, on m'a laissé tout faire moi-même. Certains sentiments ne peuvent être rendus uniquement par des mots, mais peuvent l'être grâce à la musique. Avec le bon choix de piste audio, on peut améliorer l'expérience cinématographie de deux à trois fois. C'est ce que j'ai appris là-bas.

Y a-t-il quelque chose qui vous a posé problème lors de la réalisation de ce film, au milieu du coronavirus ?

Au studio, nous avions séparé nos bureaux et organisions nos réunions via des vidéos conférences, mais je n'arrive pas trop à m'y faire (rires). Lorsque vous créer une animation, ou n'importe quel genre de film, il y a un nombre incroyable de nuances que vous transmettez à votre équipe en personne, lorsque vous travaillez dessus. C'est le genre de chose qui manque, lors d'un appel en visio. Il est plus difficile pour les gens de vraiment comprendre ce que vous voulez dire. Il y a eu quelques fois qui ont pris plus de temps que nécessaire à cause de cela.

Je me sens redevable envers l'équipe de Pompo. Il a été très facile de travailler avec eux, et ils ont avancé dans la production sans montrer le moindre signe de fatigue, je n'ai donc pas l'impression que notre travail a été beaucoup retardé. Tout le monde a été très motivé.

Cette interview s'est tenue en août. Merci à my theater D.D. pour l'aide.


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